Suite à son succès sur le marché local, ce
petit kung fu bis fut complété de nouvelles scènes pour donner une
série télé taiwanaise de 3 x
1h30 sortie en vhs, intitulé Mafia Kids. Mafia Vs Ninja
se place comme la première véritable
explosion du style outrageusement dynamqiue et bordélique
de Robert Tai réalisateur, déjà
accompagné de son acteur fétiche, Alexander
Lou, et son bouffon de service, le "rigolo"
Charliema Nsu. Tai n'a pas encore coupé
tous les ponts avec son expérience de la Shaw
Brothers au côté de Chang Cheh. La première
moitié du film est donc assez classique non
seulement dans sa narration au ras des paquerettes,
ce qui est presque évident pour un kung fu,
mais aussi lors des deux premiers combats qui sont
encore bien old school, techniques et ma foi assez
violents et rapides pour être déjà
sympas, dans la droite lignée des artisans
du genre, avec un petit quelque chose de typiquement
Tai dans son montage cheap mais bougrement énervé.
Les combats suivants sont de suite plus délirants
et utilisent notamment des "reverse" et
des vols planés qui fleurent bon la liberté
sans limite que Tai va pousser de plus en plus loin
par la suite. N'oublions pas les authentiques athlètes
de l'opéra et du Tae Kwon Do qui forment le
noyau dur du réalisateur, à commencer
par Alexander Lou, comme toujours le héros
rebelle, droit et soupe au lait qui se rapproche ici
de Bruce Lee avec notamment son attitude héroïque,
son costume blanc impeccable et un record de pouces
sur le nez assez impressionant.
L'histoire
se rapproche de celle de Boxer from Shantung.
Alexander est un jeune prodige du kung fu qui
débarque en ville et se fait vite engager
comme garde du corps par un parrain local dont
il sauve la peau lors d'un attentat. On s'arrête
là pour le parallèle. Un caïd
rival (le frère d'Alexander,
Tong Lung... une armoire normande trappue du meilleur
goût) va alors engager un groupe de tueurs
professionnels pour liquider le maître d'Alexander
et c'est là que le film va irrémédiablement
tourner vers les folies les plus débridées
de Tai. Mais on attend tout de même un
bon moment, trop longtemps, avant que le film
parte vraiment en showTai. Cette bande de tueurs
constitue la première apparition des gweilos
préférés (il y en aura d'autres)
qui participeront aux autres Robert Tai :
Eugene
Thomas pour le grand black, kick boxer fatal au
faciès réjouissants et Silvio Azzolini
pour le lanceur de couteaux balafré, blanc,
grand et sec aux mimiques mémorables. Un
énorme sabreur japonais Chi Kuo Chung,
habitué des rôles "énormes")
les accompagne, arborant une moustache "IIIème
Reich" du plus bel effet, signe distinctif
de reconnaissance des maîtres du ninjitsu,
ainsi qu'un autre combattant et une meute de ninjas
kamikazes.
La
configuration "bestiaire street fighter"
fait donc son apparition et Robert ne lâchera
plus cette recette qui lui permet d'enchaîner
les combats avec un strict minimum de dialogues, en
contrepoids total avec le début du film qui
tente vainement de développer un récit
mafieux bien trop nanar pour convaincre. Dès lors, ça vole,
ça saute, ça tranche, le sang gicle,
des mannequins en mousse volent à 15m, les
câbles débordent du cadre à chaque
instant, les gros plans sont innombrables et s'enchaînent
frénétiquement, le montage est illisible
pour un non habitué, des touffes d'herbe courent
sur le sol, sautent dans un arbre ou explosent à
la figure. Tout est normal, c'est Robert et ses ninjas
qui usent de la technique de dissimulation à
son apogée. Les films de Robert Tai, ce sont des moyens
ridicules, une image d'outre tombe, un montage insaisissable,
mais surtout c'est un foisonnement de combats bis
vraiment frappés et un niveau technique de premier ordre avec une panoplie éclectique
de vrais techniciens Taiwanais qui excellent dans les arts martiaux.
Mafia vs Ninja est un premier aperçu qui n'a
aucune autre ambition que de distraire les fans de
kung fous grâce à sa vraie folie, sans
emballage ni ruban. Irrécupérable pour
la plupart, réjouissant pour les autres!